32ème jour: Keys to the City
Photo de Marc Courdier ©
"Une ville ressemble à un animal.
Elle possède un système nerveux,
une tête, des épaules et des pieds.
Chaque ville diffère de toutes les autres :
il n'y en a pas deux semblables.
Et une ville a des émotions d'ensemble."
John Steinbeck
La Perle
Un vélo a déboulé, au moment où j'allais traverser. Suivie d'un crissement de pneus. Le cycliste a poursuivi sa route. La voiture à son tour. Elle a barré le chemin du cycliste. Des portières se sont ouvertes. Une femme, puis un homme ont surgi. L'homme a hurlé quelque insulte à l'adresse du deux-roues, qui s'est enfui. La voiture a redémarré. Le vélo a emprunté le trottoir, est revenu en sens inverse. Repris son chemin. La voiture à ses trousses. Le deux-roues a disparu, la voiture l'attendait plus loin. La rue est restée vide. Puis l'automobile s'est résolue à partir, dans une fumée furieuse.
Nous étions plusieurs sur le trottoir, figés.
J'ai marché, encore interloquée. Autour de moi, il m'a semblé que le monde bouillonnait à l'instar de la scène dont j'avais été la spectatrice. Les klaxons fusaient de part et d'autre, les gens semblaient manquer de se heurter à tout bout de champ. Les rayons du soleil réchauffaient encore les rues, malgré qu'une ombre grandissante capturait les façades des maisons. Le soir est tombé. Le calme est revenu.
L'un après l'autre, mes voisins ont allûmé la lumière chez eux. J'ai laissé l'eau me laver de la fatigue, ai vêtu mes paupières de leur fard de noce, mis mes vêtements de nuit, puis suis sortie, à la rencontre de la cité.
Aux fenêtres des bus, les visages, aux traits tirés, semblaient animés d'une petite flamme. L'éveil du printemps.
L'air était chaud.
La ville a poussé un profond soupir.
Et j'ai souri.